Triste nouvelle officialisée aujourd’hui, avec le décès de la légendaire Rieko Kodama made in SEGA Japan : aussi connue sous le pseudonyme Phoenix Rie, elle est « la première dame du RPG » et l’une des toutes premières femmes à un poste clé (1984) dans l’industrie des Jeux Vidéo. Rieko était appréciée pour son énorme talent, sa créativité, sa polyvalence et sa gentillesse.
- Rieko Kodama : joyau des Jeux Vidéo – destin hors du commun
- Rieko Kodama / 小玉理恵子 : le message dans les crédits de fin qui déclenchera les hommages
- Rioko Kodama : une incroyable créativité !
- Rieko Kodama : savoir-faire, état-d'esprit-d'esprit et confidences au travers d'une interview d'époque
- Rieko Kodama : immense émotion pour rendre hommage à la Yu Suzuki féminine…
- Rieko Kodama : une mère vidéoludique et spirituelle nous quitte…
Rieko Kodama : joyau des Jeux Vidéo – destin hors du commun
Design publicitaire, conception graphique, développeuse au destin hors du commun, pétrie de talent.
Elle s’essaya d’abord à l’Archéologie et à l’Art lorsqu’elle était à l’université, mais échoua dans ses différents cours. Rieko se dirigera finalement vers une école de Commerce avec une spécialisation en création graphique publicitaire, lui rappelant son enfance à faire ce type de créations : une voie qui lui était prédestinée ?
Un étudiant que Rieko connaissait au sein de leur université commune venait d’y être engagé et l’invita à faire de même. Elle entra donc officiellement chez SEGA Japan et elle fût tout de suite mise en confiance lorsqu’elle y entra au début des années 80.
Rieko Kodama gravira alors tous les échelons, grâce à une très grande capacité d’adaptation et une polyvalence qui lui feront atteindre des sommets chez Sega Japon. La firme de Haneda avait su être pionnière en accueillant les bras ouverts cette jeune prodige et lui offrir toute la confiance nécessaire pour la faire grandir positivement.
Rieko Kodama aura su se métamorphoser en Phoenix Rie : telle une chenille ouvrant sa chrysalide et sortir métamorphosée en un magnifique papillon. Sega aura donc été l’environnement propice / sécurisé pour faire naître ce changement tel un miracle de la nature. Pour faire mûrir Rieko en l’une des meilleures personnes créatives (hommes et femmes confondus) chez SEGA / toutes firmes confondues.
Une sacrée carrière qu’aura su mener de bout en bout Rieko Kodama : aussi bien en étant la première femme au sein d’un RPG, qu’à incorporer une femme parmi les héros de Fantasy Star. Mais aussi en étant récompensée en 2019 lors de la Game Developers Conference (GDC) et devenir la 1ʳᵉ femme à recevoir un prix lors de ce festival professionnel (la première femme – 2019 : la Game Developers Conference serait-elle rétrograde pour avoir mis autant de temps à cela ?).
Rieko Kodama / 小玉理恵子 : le message dans les crédits de fin qui déclenchera les hommages
Suite à l’apparition d’un message en guise d’hommage à Rieko Kodama lors d’un jeu terminé sur Megadrive Mini : la communauté des fans SEGA a été en émoi. SEGA Japan n’a donc pas eu d’autre choix que d’officialiser le décès d’un de ses plus incroyables talents : Phoenix Rie s’en était allé le 09 mai 2022…
La vidéo à parti de laquelle tout a commencé (le même genre), avec ce phénomène de Rieko Kodama Death :
Concernant le pourquoi du comment : le cercle Familial et le cercle des proches n’avait pas voulu que les choses s’ébruitent afin de pouvoir se recueillir dans la plus stricte intimité : chose que SEGA a respecté à la lettre, jusqu’à ce qu’un fan se rende donc compte du message hommage en finissant un jeu sur Megadrive Mini…
Rioko Kodama : une incroyable créativité !
Rioko Kodama a tellement bien su s’intégrer dans l’univers si particulier des Jeux Vidéo des années 1980 (d’autant plus à cette période-là au Japon) qu’elle a pu très vite faire ses preuves et gravir tous les échelons. Design Publicitaire, Conception Graphique, Développeuse, Support, Supervision, Directrice, Productrice : Rioko Kodama a toujours su être d’une grande polyvalence et très compétente dans ses postes occupés.
Elle nous laisse 44 jeux (avec les remakes) presque tous plus légendaires les uns que les autres, qu’il s’agisse de borne d’Arcade ou de consoles de salons (SEGA ou non).
Listing des 44 jeux de Rioko Kodama :
- Champion Boxing – 1984.
- Ninja Princess (au Japon) – Sega Ninja (ailleurs).
- Quartet – 1986.
- Black Onyx.
- Alex Kidd in the Miracle World.
- Phantasy Star – 1987.
- Zillion.
- Fantasy Zone II : the Tears of Opa-Opa.
- SpellCaster – 1988.
- Hoshi wo Sagashite.
- Miracle Warriors : Seals of the Dark Lord.
- Altered Beast.
- Poseidon Wars 3-D – 1989.
- Phantasy Star II.
- Mystic Defender.
- Alex Kidd in the Enchanted Castle.
- Sorcerian – 1990.
- Shadow Dancer : the Secret of the Shinobi.
- Phantasy Star III : Generations of Doom.
- Castle of Illusion Starring Mickey Mouse.
- Sonic the Hedgehog – 1991.
- Riddle Wired : Quiz Dokusen Kigyo No HoKaï.
- Advanced Daisenryaku : Doitsu Dengeki Sakusen.
- Togi O King Colossus –1992.
- Sonic the Hedgehog 2.
- Ayrton Senna’s Super Monaco GP II.
- Sonic CD – 1993.
- Phantasy Star IV : the End of the Millennium.
- The Hybrid Front – 1994.
- Magic Knight Rayearth – 1995.
- Deep Fear – 1998.
- Skies of Arcadia – 2000.
- Phantasy Star Collection – 2002.
- Skies of Arcadia : Legends – 2003.
- Sega Ages 2500 : Vol.1. Phantasy Star Generation : 1.
- Sega Ages 2500 : Vol.17 – Phantasy Star Generations : 2 – 2005.
- Altered Beast.
- Sega Ages 2005 : Vol.32 – Phantasy Star Complete Collection – 2008.
- 7th Dragon – 2009.
- Sonic CD – 2011.
- 7th Dragon 2020.
- 7th Dragon III : Code VFD – 2015.
- SEGA Heroes – 2018.
- Sega Ages – Virtua Racing – 2019.
- Alex Kidd in the Miracle World DX – 2021.
En débutant quasiment sur Alex Kidd in the Miracle World, 2 ans après ses balbutiements (1986) – en finissant sur Alex Kidd in the Miracle World DX (2021) nouvelle génération : on peut malheureusement affirmer que la boucle est bouclée… « Drôle » signe de la vie, parfois…
Rieko Kodama : savoir-faire, état-d’esprit-d’esprit et confidences au travers d’une interview d’époque
Voici un extrait d’interview d’époque afin de mieux comprendre l’impact majeur qu’a pu avoir cette virtuose de la création. Débuts de Rieko Kodama au sein de la Dream Team de SEGA Japan, sa façon d’imaginer les éléments de jeux et son rôle en tant que femme dans un monde très masculin à l’époque (encore aujourd’hui : moins de 30 % de femmes composent les effectifs des studios de Jeux Vidéo à travers le monde) :
« … Q : Comment le projet Phantasy Star a-t-il démarré ?
RK : Eh bien, à l’époque, je n’étais qu’un designer, donc pour être honnête, je ne sais pas vraiment ou ne me souviens pas exactement comment le projet a commencé. À l’époque, cependant, Dragon Quest était très populaire, donc en tant que fabricant de matériel, Sega a estimé qu’il avait besoin de son propre RPG. Beaucoup de gens dans l’équipe voulaient vraiment faire un pur RPG aussi, donc je pense que le projet Phantasy Star a décollé à partir de là.Q : Comment l’équipe de développement était-elle structurée ?
RK : Ossale Kohta [Kotaro Hayashida, qui a conçu la série Alex Kidd et travaille maintenant chez Game Arts] était le planificateur principal. [Yuji] Naka était le programmeur principal. BO [je ne connais pas son vrai nom mais il a participé à presque toutes les bandes originales de Master System, ainsi que celles de PSII] a fait la musique, et j’étais le concepteur principal. Nous avions aussi quelques assistants, donc je dirais que nous étions sept ou huit en tout.Q : De quelles sections de Phantasy Star étiez-vous responsable ?
RK : Pour Phantasy Star, j’étais le designer principal. J’ai dessiné toutes les conceptions des personnages, les cartes 2D (pas les zones de donjon 3D), les arrière-plans des scènes de bataille, les habitants de la ville, etc.Q : Qu’est-ce qui vous a le plus préoccupé lors de la création des cartes ?
RK : Le concept entre nous tous était de toujours garder le jeu animant quelque chose. En conséquence, lorsque vous regardez l’océan sur la carte du monde, vous remarquerez qu’il bouge, et vous pouvez également voir les passerelles entre les villes bouger. Cette philosophie rendait plus difficile pour les gens de se promener en ville, mais… (rires)Q : Pourriez-vous nous dire d’où viennent les images originales des quatre personnages principaux – Alisa (Alis), Myau, Tairon (Odin) et Rutz (Noah) ?
RK : Bien sûr. Passons en revue chacun d’eux, un par un.Q : Les RPG commençant par des femmes étaient rares à cette époque.
RK : Ils l’étaient. À cette époque, presque tout le monde dans l’industrie [des consoles] essayait pour la première fois de créer un RPG, nous étions donc tous à la recherche d’idées. Cependant, chez Sega, nous nous sommes tous vraiment mis au défi avec ce jeu, nous nous sommes donc éloignés autant que possible de la route principale pendant le développement. Ainsi, par exemple, nous n’avons vu de donjons 3D dans aucun autre RPG de console, nous avons donc décidé de les mettre, et les monstres ne se déplaçaient dans aucun autre RPG, nous avons donc inclus une animation de monstre… ce genre de chose. Nous avons toujours essayé de faire le contraire.
C’est peut-être ce qui nous a poussés à faire du héros de Phantasy Star une femme. Chaque RPG à l’époque avait des héros masculins, alors… »
Rieko Kodama : immense émotion pour rendre hommage à la Yu Suzuki féminine…
Ce n’a pas été sans mal de rédiger cet article sous forme d’hommage : c’est même avec grande tristesse que ces modestes lignes ont été écrites…
Néanmoins : il était une obligation morale d’absolument rendre hommage à cette grande Dame qui avait eu tant de courage / de passion et pousser la porte de SEGA Japan (il faut se replacer dans le contexte de l’époque). Elle qui a si bien su intégrer des éléments de ses passions dans son travail (Histoire, Arts, Égyptologie et civilisations anciennes…).
Ce qui fait qu’un Créateur est excellent dans le milieu des Jeux Vidéo : en ne restant pas cantonné qu’à un unique univers, l’Artiste va piocher dans sa Culture générale et perpétuellement enrichir l’univers du jeu sur lequel il travaille.
Rieko a ainsi aidé à propulser notre 8ᵉ Art en mélangeant les Arts traditionnels tout en y ajoutant l’interactivité en prime pour faire des Jeux Vidéo des produits Culturels uniques en leur genre. Rieko Kodama l’avait compris bien avant tout le monde et a été l’une des personnes les plus influentes : créant de véritables révolutions de fond tout en bouleversant les codes déjà établis et faire de nouvelles bases.
Dire qu’il s’agit de la Yu Suzuki au féminin est un immense hommage. Car Yu a créé et révolutionné en profondeur les Jeux Vidéo / bon nombre de domaines (des effets majeurs dans bien d’autres domaines : 3 Dimensions, programmation, simulation, graphismes, audiovisuel, effets spéciaux, construction du jeu, narration…).
D’ailleurs, Yu Suzuki et Rieko Kodama ont travaillé ensemble sur leur 1er jeu : le légendaire jeu d’Arcade Champion Boxing en 1984. C’est dire l’importance qu’avait cette créatrice hors pair qu’avait au sein de Sega Japan.
Rieko Kodama : une mère vidéoludique et spirituelle nous quitte…
D’un point de vue plus personnel, j’ai été initié très jeune via une Univox Pong 4In, une Atari 2600 et une Master System 2. Avec Alex Kidd in the Miracle World, The Ninja, Fantasy Zone II, Sonic the Hedgehog, Arton Senna’s Super Monaco GP II… En rêvant des autres jeux (donc certains créés par Rieko…) sur fameuses publicités habilement mises par SEGA dans les boites de jeux.
Un catalogue, avec des jeux en partie inaccessibles à l’époque : mais favorisant la sociabilisation et la passion par l’échange physique (et non pas via une quelconque dématérialisation) entre copines et copains de classe. Pour ensuite connaître les : Altered Beast, Shadow Dancer, Castle of Illusion Starring Mickey Mouse, Deep Fear, Phantasy Star Online version 1, Skies of Arcadia…
De Plus, Chérif de TestMoiJeuxVidéo.Fr parlant relativement bien japonais et étant passionné du travail de Rieko Kodama : il la connaissait assez bien, échangeait avec elle et avait pu la rencontrer à plusieurs reprises. Cette nouvelle l’a profondément touché : je me joins à toi pour ces moments difficiles à digérer, l’Ami.
C’est en quelque sorte une mère vidéoludique que nous perdons toutes et tous, qui a su offrir autant de générosité et aider à hisser les Jeux Vidéo à leur place actuelle, en lui donnant ses lettres de noblesse.
C’est donc le cœur serré qu’il faudra conclure par : « la disparition est à l’image de sa carrière et de ce qu’a pu léguer Rieko Kodama à l’univers des Jeux Vidéo : incommensurable… Respect. Paix à son âme. »